08/06/2022 - 14:28
Transmanche : ils disent non au modèle low cost
<p>Marins, salariés, acteurs économiques et syndicaux, usagers, élus et habitants du territoire. Une centaine de personnes était réuni hier soir à la salle Paul-Éluard. À l'invitation du secrétaire général de la Fédération nationale des syndicats maritimes CGT, Pierrick Samson, du secrétaire général de l'Union fédérale maritime CFDT Thierry Le Guevel et du maire de Dieppe Nicolas Langlois, tous se sont rassemblés pour préserver le haut niveau de garanties sociales et de sécurité sur les lignes transmanches, qui est menacé par le développement d'un modèle low cost, à l'instar de ce qui s'est passé récemment en Angleterre avec la compagnie Peninsular and Oriental steam navigation company (P&O Ferries).</p>
<p>En effet, le 17 mars dernier, sans préavis, 800 marins britanniques travaillant à bord des ferries transmanches ont été licenciés, via une visioconférence (!), et remplacés par des marins non nationaux, embauchés avec des salaires et des conditions sociales indignes. La crainte est de voir ce dumping social (pratique qui consiste pour un État ou une entreprise à appliquer des législations sociales plus défavorables aux salariés que dans d'autres pays, en termes de droit du travail et de salaires) se répandre sur d'autres lignes transmanches, y compris celle de Dieppe-Newhaven dont la délégation de service public doit être renouvelée en fin d'année </p>
<p><em>« C'est important qu'on se rencontre collectivement pour dire qu'il y avait un danger à laisser croire que ce qu'a fait P&O pas fasse tâche d'huile</em>, a énoncé en guise d'introduction le maire Nicolas Langlois. <em>Quand il n'y a pas de règles communes, que l'objectif recherché n'est pas l'intérêt général, c'est la loi de la jungle, les libéraux peuvent faire ce qu’ils veulent ! En plein renouvellement de la délégation de service public de la ligne Dieppe-Newhaven, on fera en sorte que le dumping social (…) ne soit pas la norme ! »</em></p>
<p>Dix-sept semaines d'embarquement à bord (contre 14 jours en mer puis 14 jours à terre pour les salariés de DFDS sur la ligne Dieppe-Newhaven), salaires horaires en deçà du salaire minimum, recrutements sous-traités, absence de normes collectives avec l'utilisation de pavillons de complaisance (Chypre, Bahamas…)… : Pierrick Samson dénonce un <em>« esclavagisme moderne »</em> et martèle qu'il <em>« ne veut pas de ce modèle-là sur nos côtes ! »</em>. Car le risque est que d'autres compagnies que P&O soit <em>« dans la même logique de ce modèle économique low-cost »</em>, selon Thierry Leguevel.</p>
<p>La garantie d'un statut pour les marins salariés est un gage de sécurité. <em>« C'est bon pour les marins et leurs familles, mais c'est aussi important pour la qualité du service</em>, a indiqué le député Sébastien Jumel. <em>C'est, par exemple, un vrai métier d'intégrer des camions dans un bateau. Ce n'est pas une bataille corpo, ce ne sont pas des privilèges, ce sont des garanties pour ceux qui prennent notre ligne ! » </em></p>
<p>Présent à ce rassemblement, le directeur général de DFDS — compagnie exploitant la ligne transmanche Dieppe-Newhaven —, Jean-Claude Charlo estime que <em>« quand les syndicats de DFDS se lèvent, c'est que le moment est important, et il est important »</em>. À DFDS, 140 marins sont nécessaires pour amarrer un bateau ; contre 80 avec des compagnies low cost. <em>« Il y a une économie de 60% par rapport au modèle de DFDS (sous pavillon français premier registre) et des coûts de production 30% moins élevé</em>s, ajoute le DG de DFDS. <em>Mais ces économies-là se font sur les repos et la santé des marins ! L'urgence est là. La concurrence ne fait peur à DFDS, à condition que les règles du jeu soient les mêmes pour tout le monde. »</em></p>
<p>Et le maire de Dieppe de conclure : <em>« En mer, la sécurité, ça ne se négocie pas ! Ni pour les équipages, ni pour les passagers, a fortiori dans la Manche, la mer la plus fréquentée d’Europe. C’est pourtant bien ce que le « dumping social» met en péril. La qualité des lignes Transmanche doit être exemplaire et son modèle doit être socialement exigeant. À Dieppe,nous sommes vigilants à ce qu’en mer, cela ne devienne pas un espace de non-droits. »</em></p>
<p><em>© Photo : Erwan Lesné</em></p>
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