08/10/2019 - 14:41
Handicap : les AESH sans paye et sans contrat
<h3>Un immense scandale… La désorganisation de la rentrée des AESH (accompagnants des élèves en situation de handicap) est indescriptible. Pire, le ministère de l'Education nationale n'a pas versé les salaires ni même établi les contrats. Le maire Nicolas Langlois et le député Sébastien Jumel sont vent debout.</h3>
<p>Un mois de travail et un salaire de 3,32 €… Inimaginable. Et pourtant. C'est l’acompte qu'a perçu l'une des AESH de Dieppe tout début octobre. Une humiliation pour ce personnel de l'Education nationale dont les missions sont pourtant au cœur des enjeux de l'inclusion des élèves en situation de handicap. Depuis la rentrée, la plupart des AESH n'ont empoché qu'une partie de leur rémunération pour le mois de septembre et n'ont même pas signé de contrat de travail. <em>« On nous explique que le ministère a changé le logiciel informatique permettant de créer les contrats et d'éditer les bulletins de paye mais qu'il a été fourni tard aux administrations et qu'il dysfonctionne</em>, signale Lysiane, AESH à l'école Sonia-Delaunay. <em>Cela nous paraît totalement inhumain. Car, de notre côté, nous sommes auprès des enfants depuis la rentrée, au quotidien. Eux, n'ont pas à subir les carences du ministère. Mais c'est difficile d'avoir la même étincelle pour faire son travail. »</em></p>
<p><strong>« Ubérisation de l'éducation »</strong></p>
<p>Jennifer a vécu une rentrée plus que mouvementée. Comme ses collègues, elle a simplement reçu des mails durant l'été lui annonçant les établissements au sein desquels elle doit intervenir. Mais au premier jour, surprise, elle découvre que les chefs d'établissements ne sont même pas au courant de ses affectations. Pire, l'un des étudiants en BTS à Ango qu'elle est censée accompagner s'est déjà vu accorder l'aide d'une autre AESH. Et le tout sans salaire… Ubuesque. <em>« Je n'ai reçu qu'un acompte au début du mois d'octobre après que nous nous soyons mobilisés</em>, déplore-t-elle. <em>Je vis seule avec mes trois enfants. Comment dois-je faire pour payer mon loyer, mes factures et remplir le frigo. On a dû manger des pâtes pendant trois semaines. »</em></p>
<p>Une situation révoltante qui n'a pas manqué de faire réagir le maire de Dieppe Nicolas Langlois et le député Sébastien Jumel, qui, dès les premières alertes, ont multiplié les interventions. <em>« C'est un mépris insupportable à l'égard des AESH</em>, enrage le maire. <em>Leur mission est essentielle pour permettre aux élèves en situation de handicap de suivre leur scolarité dans les meilleures conditions. Certes, et c'était une étape importante, des recrutements ont eu lieu après le mouvement mené déjà il y a un an pour assurer l'accompagnement de nombreux enfants qui n'en disposaient, alors, pas. Mais nous sommes face à un scandale avec un Etat qui fait de la précarité de son personnel la norme. Or, on ne peut pas bien s'occuper des gens quand on est soit même fragilisé et quand on travaille pendant deux mois sans être payé. On ne peut pas tolérer cette forme d'ubérisation de l'éducation de nos enfants. »</em></p>
<p><strong>Le député a vu le ministre</strong></p>
<p>Auteur d'un rapport parlementaire sur l'inclusion des élèves handicapés,Sébastien Jumel a reçu, longuement, ce lundi aux côtés du maire, les AESH. Dès mardi matin, lors d'une entrevue avec le ministre de l'Education nationale, il a pointé ces graves irrégularités dont est victime le personnel. <em>« Le ministre a reconnu que cette situation, qui est généralisée dans toutes les académies de France, est inconcevable et qu'elle doit être réglée en urgence</em>, relate l'élu. <em>Nous avons affaire à un personnel, majoritairement des femmes, qui est employé à temps partiel avec des salaires excessivement bas. Aujourd'hui, sans contrat, elles ne peuvent même pas obtenir le complément de salaire auquel elles ont droit et que leur verse Pôle emploi. C'est particulièrement maltraitant. C'est pourquoi, nous allons continuer à exiger qu'elles obtiennent enfin un vrai statut, parce que c'est un vrai métier. »</em></p>
<p>A l'échelle du département, on recense aujourd'hui 1300 AESH, qui entendent bien se battre contre le <em>« handicap salarial »</em> qu'il leur est imposé par l'Education nationale, leur employeur.</p>
<p>© Photo : Erwan Lesné</p>
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