07/09/2023 - 09:49
François Morel : « Ce qui à première vue paraît inutile s'avère indispensable »

<h3>Sensibles et drôles, le comédien, humoriste, poète et chroniqueur de France Inter, François Morel, et son fils Valentin, auteur, forment un duo atypique qui se produira sur la scène du conservatoire Camille Saint-Saëns, vendredi 6 octobre à 20 heures dans le cadre du festival <a href="http://terresdeparoles.com/">Terres de paroles</a>. Ils se donnent ainsi la réplique dans le spectacle Le dictionnaire amoureux de l’inutile inspiré de l’ouvrage qu’ils ont rédigé à quatre mains. Interview.</h3>
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<p><strong>Pour les Normands que vous êtes, jouer à Dieppe ça a une saveur particulière ?<br />
François Morel :</strong> « Le normand que je suis me semble géographiquement assez éloigné du normand dieppois. Quand, enfant, j'allais à la mer, c'était plutôt du côté du Mont-Saint-Michel, de Port-en-Bessin ou de Luc-sur-Mer. Dieppe, c'était loin ! J'ai heureusement eu le bonheur en grandissant de mieux connaître ce qu'on appelait jadis la Haute-Normandie riche à mes yeux de paysages extraordinaires et d'amis précieux ! »</p>
<p><strong>Valentin Morel :</strong> « Né à Paris, je ne suis normand que d’origine, par mon père, ma mère et les étés d’enfance passés dans l’Orne chez mes grands-parents. Aujourd’hui, mon lien avec la Normandie est plus nostalgique que concret, fait de souvenirs lointains et ensoleillés. Ceci étant précisé, je n’éprouve, moi, aucune difficulté à m’accaparer le territoire dans son ensemble, de Vernon au Mont-Saint-Michel, et à me revendiquer normand quand je suis à Paris. Venir à Dieppe c’est donc comme jouer à la maison. »<br />
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<p><strong>Vous êtes les auteurs d’un dictionnaire amoureux de l’inutile que vous adaptez désormais à la scène. Pourquoi l’inutile ?<br />
F.M. :</strong> « Ce n'est pas spécialement un livre consacré à l'absurde même si l'absurde y est parfois présent. Je crois que le point de départ, c'était l'idée des ricochets. Quand on est au bord de la mer et qu'on s'amuse à saisir un galet plat pour essayer de le faire rebondir sur l'eau, ce n'est pas un instant critique. On ne peut pas spécialement s'en prévaloir le soir en rentrant chez soi mais ça peut être un instant de vie irremplaçable pour peu que ce soit un jeu entre un adulte et un enfant, un joli moment de complicité et d'amusement. Alors, on a commencé comme ça, tenter de collectionner tout ce qui à première vue paraît inutile et cependant s'avère indispensable... »</p>
<p><strong>V.M. :</strong> « Et nous nous sommes rapidement rendus compte, à condition de trouver le bon angle, que ce thème de l’inutile était suffisamment large pour nous laisser la liberté de parler de quasiment tout ce que nous voudrions. Parce que tout peut être regardé, selon le point de vue, comme étant inutile. »<br />
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<p><strong>C’est d’abord un ouvrage. Qu’est-ce qui vous a amené à le présenter sur les planches ?<br />
F. M. :</strong> « On n'aurait sans doute pas eu l'idée de faire une lecture-spectacle si on n'avait pas été sollicité. On s'est rendu compte que dire des extraits sur scène (parce qu'on ne peut pas tout lire : le livre est trop épais !) provoquait de jolis moments, parfois drôles, parfois émouvants, et nous permettait de voyager dans un imaginaire assez riche qui pouvait nous faire passer de l'évocation d'Intervilles à la baguette de Léonard Bernstein en passant par les canulars de Jean Carmet ou la disparition d'un animal familier... »</p>
<p><strong>V.M. :</strong> « Que les spectateurs ne s’inquiètent pas trop, si nous lisons effectivement nos textes, nous avons essayé de leur éviter au maximum l’ennui. Le rythme est enlevé, il y a un piano sur scène, de la musique, des projections vidéo, nous nous déplaçons dans l’espace, il y a même des effets lumière grandioses ! C’est pas de la comédie musicale, mais presque… »<br />
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<p><strong>Parlez-nous de cette relation père-fils. Qu’est-ce qui vous a amené à partager la scène ?<br />
F.M. :</strong> D’abord, écrire un dictionnaire tout seul me semblait impossible. J'ai donc proposé à Valentin, dont je connaissais la plume et l'esprit, de le faire à deux. Quand il a été question d'en présenter une version scénique, c'était tout naturel qu'on poursuive l'entreprise à deux ! »<br />
<strong>V.M. :</strong> « Plus jeune, j’aurais sûrement refusé de travailler avec mon père. Orgueilleux, je voulais me construire sans son aide, ne pas faire comme tous les fils de. Avec l’âge, ces barrières tombent: on se rend compte que le temps passe vite et qu’il faut profiter de ses parents. C’était aussi l’occasion, par le travail, de se découvrir l’un l’autre à travers un nouveau prisme. »<br />
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<p><strong>Valentin, cette expérience de la scène a-t-elle fait évoluer vos rapports à tous les deux ?<br />
V.M. :</strong> « L’écriture, d’abord, a changé des choses. L’enjeu était de prouver, à moi d’abord puis à mon père, que je pouvais être à la hauteur. Mais même si le livre a été écrit à quatre mains, l’écriture reste un travail solitaire. On peut revoir des détails ensemble mais plus difficilement le fond. Sur les lectures il y a plus un travail de duo. N’ayant jamais fait de scène, ni pris de cours de théâtre, je me retrouve comme un étudiant, j’apprends de son expérience, j’essaie de suivre à la lettre les conseils de mon père. « Si tu dis ça comme ça, si tu prends un temps à ce moment-là, tu verras, les gens vont rire. » Jusqu’à maintenant il a toujours eu raison ! »<br />
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<p><strong>Vous prenez plaisir tous les deux à vivre cette expérience partagée ?<br />
F. M. :</strong> « Oui, c'est naturellement parce qu'on prend du plaisir en le partageant avec le public qu'on vit cette expérience. Valentin apporte souvent une dimension personnelle, sensible, qui rend la soirée plus touchante que ce que l'on aurait pu imaginer au départ... »</p>
<p><strong>V.M. :</strong> « Un plaisir immense ! Celui de la découverte de la scène, de dépasser la peur du public, le plaisir de s’améliorer d’une représentation à l’autre, de rencontrer les spectateurs. Et de passer du temps avec mon père, ce qui n’est pas, pour le coup, inutile. »</p>
<p><strong>Propos recueillis par Stéphane Canu</strong></p>
<p>© Photo : Arnaud Journois</p>
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<p><strong>Bio express</strong></p>
<p>François Morel</p>
<p>Né en 1959 à Flers (Orne). Acteur, metteur en scène, humoriste, essayiste, chanteur et chroniqueur à France Inter.</p>
<p>Valentin Morel</p>
<p>Né en 1989 à Paris. Auteur.</p>
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<p><strong>Le spectacle</strong></p>
<p><em>Le dictionnaire amoureux de l'inutile</em></p>
<p>Adapté de l'ouvrage déjà écrit à quatre mains par François et Valentin Morel et publié chez Plon, il sera joué le vendredi 6 octobre à 19 heures au conservatoire Camille Saint-Saëns dans le cadre du festival Terres de paroles.</p>
<p>Complet. Se présenter 30 minutes avant le spectacle.</p>
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